lundi 9 juin 2025

Kiyoshi Kurosawa, Cloud, 2025

Un revendeur est démasqué par ceux qu’il a arnaqués. Le film commence comme une chronique de l’e-économie, vire en Délivrance, en un film de traque, puis en western dans un bâtiment industriel. Cloud est trop long et donne souvent l’impression de bifurquer génériquement par épuisement de sa forme. La dernière séquence, très réussie et inattendue, décadre encore le film vers autre chose. Ce n’est pas entièrement abouti, mais sa singularité mérite le détour.

dimanche 8 juin 2025

Martin Scorcese, Taxi driver, 1976

Un vétéran reconverti en chauffeur de taxi cherche une manière de se réintégrer dans le monde, puis de réparer ce dernier. Il échoue et reprend une vie normale. Un film d’errance urbain, formellement riche, mais surévalué par rapport à d’autres œuvres de la filmographie de Scorsese.

samedi 7 juin 2025

Victor Vu, Inspecteur Kien, 2025

XIXe siècle, un village dans la montagne, des cadavres décapités retrouvés dans la rivière, un fantôme monstrueux, l’inspecteur enquête. Effets maximaux pour une intrigue minimale, mais on se laisse emporter par cette enquête fantastico-horrifique enfantine, son Sherlock Holmes vietnamien, ses décors et sa langue exotiques.

vendredi 6 juin 2025

Damien Chazelle, Lalaland, 2016

Conte, comédie musicale, deux artistes qui espèrent une forme d’accomplissement, se croisent, s’aiment puis prennent des chemins différents. C’est très beau, émouvant, magnifiquement interprété, mais superficiel et caricatural.

 

jeudi 5 juin 2025

Jean-Luc Godard, Scénario, 2024

Scénario, le dernier film inachevé de Godard, est précédé d’un documentaire dans lequel Godard explique à ses assistants, à partir d’une « brochure » qui tient lieu de storyboard, la manière dont le film pourrait se dérouler.

De ces idées, il ne reste pas grand-chose dans la version réalisée et montrée du film.


Cette articulation entre les indications de tournage et le film lui-même compose une sorte de variations des formes qu’il aurait pu prendre — un statut entre l’ébauche et la finalisation.


Dans le film : des images fixes, des extraits d’autres films : Week-endOnly Angels Have Wings…, des parasitages sonores, et le final, une minute de Godard lui-même, assis sur son lit, chemise ouverte, lisant. Sa voix, parfois chevrotante dans de plus anciennes interventions, ne l’est pas ici. Il n’y a pas une once de morbidité ni de vieillesse dans ces images.


Comment évaluer ce geste, un peu abscons et magnifique, témoignant de la maîtrise absolue d’une vie qui se conjugue avec l’histoire du cinéma ?

Shinji Sômai, Le jardin d’été, 1994

L’été, un terrain vague au milieu des constructions modernes, une maison délabrée, un jardin envahi, et un vieil homme. Trois gamins intrigués par cet homme vont finalement l’aider à reprendre pied. Un film d’une luminosité et d’une beauté sidérantes par un réalisateur majeur. Passionnant, qu’il montre le débroussaillage d’un jardin ou qu’il s’attarde sur une scène immobile dans une piscine (et qui aurait presque pu se passer de toute autre intrigue). Un très grand film solaire.

Fabienne Godet, Le répondeur, 2025

Un écrivain engage un imitateur pour répondre au téléphone à sa place afin de dégager du temps pour écrire. Comédie un peu anecdotique mais qui déjoue habilement les attendus qu’elle semble mettre en place (la révélation de la supercherie) pour aller vers le terrain beaucoup plus subtile des entrelacs amoureux, sexuels, professionnels. Avec les excellents Denis Podalydès et Aure Atika.

mardi 3 juin 2025

Kei Ishikawa, Lumière pâle sur les collines, 2025

Royaume-Uni, 1982, une femme japonaise, veuve d’un soldat anglais, s’apprête à vendre sa maison. Sa fille, journaliste à Londres, vient l’interroger sur ce qu’elle a vécu après Nagasaki. Le film utilise ces deux époques pour évoquer l’exil, les traumatismes de la guerre, la vie quittée, ce qui se télescope, les affabulations, les séparations, les deuils. S’ouvrant et se fermant sur Ceremony de New Order, porté par une belle photographie et des décors dénaturalisants — à la limite du fantastique, d’excellents acteurs et des plans qui en évoqueront d’autres de l’histoire du cinéma japonais (Ozu, Kaneto Shindō) ce film, d’un grand classicisme et d’une grande sobriété dans sa réalisation, est un enchantement mélancolique. 

dimanche 1 juin 2025

Thibault Emin, Else, 2025

Puisant ses influences dans Delicatessen, chez Cocteau et Cronenberg, ce trip minéral sur l’asphyxie du couple et les corps composites agrégés à la matière souffre d’un scénario déficient, tentant de pallier ses lacunes par une distension « poétique » des scènes, de la pauvreté de ses effets spéciaux, de ses cadrages approximatifs, d’une prise de son défaillante et d’une direction d’acteurs hésitante. Aucune grille de lecture ne peut s’appliquer à un tel objet en deçà de tout amateurisme — et dont aucun plan (ce qui n’arrive jamais au cinéma) ne peut être sauvé. La seule question qu’il suscite est : comment a-t-il pu trouver un producteur et un distributeur ?

samedi 31 mai 2025

Dean Fleischer Camp, Lilo et Stitch, 2025

Lilo est orpheline, c'est sa grande sœur qui en a la charge, les services sociaux veulent les séparer. De son côté, un extraterrestre mutant s’échappe de sa planète d’origine. Ces deux êtres rejetés vont s’allier dans une comédie qui mêle prises de vue réelles et animation. Portée par le charme et l’espièglerie de sa jeune comédienne, baignée dans l’atmosphère ensoleillée d’Hawaï et rythmée par un montage enlevé, cette comédie émouvante pour les enfants est réussie.

vendredi 30 mai 2025

Wim Wenders, Juliano Ribeiro Salgado, Le Sel de la Terre, 2014

Photographies commentées chronologiquement par lui-même de Sebastião Salgado. Il y a une indéniable force dans ces images ; leur indéniable limite, c’est qu’elles sont avant tout des objets esthétiques, qui ne disent peut-être pas grand-chose des sujets qu’elles racontent. Le parcours, de la dénonciation sociale à la soif de réparation de la terre, témoigne du désastre du monde et de notre espèce. Un documentaire élagué de toute technique, de tous les moyens mis en œuvre, de tout système financier – qu’il aurait pourtant été intéressant de montrer – et de toute réflexion sur la nocivité de vouloir documenter ce qui devrait rester isolé.

mercredi 28 mai 2025

Frederik Louis Hviid, L’ultime braquage, 2025

Un film de braquage danois avec Reda Kateb ; la partie braquage à proprement parler est tendue, mais brouillonne. Quant au préambule, chaque fil qu’il tisse se solde de manière systématiquement déceptive. C’est dommage, car le braquage inaugural laissait présager le meilleur.

mardi 27 mai 2025

Caye Casas, Accident domestique, 2025

Court-métrage distendu en long. Le seul intérêt de ce type de film est de voir comment le coupable va réussir à dissimuler son forfait. Mais on est bien loin d’Hitchcock : le scénario est consternant, et il n’y a pas une seule idée de cinéma. Faute d’astuce scénaristique, le réalisateur n’a recours qu’à deux procédés : l’étirement infini des scènes et la condamnation de la pièce suspecte. Lorsque la comédie noire patine, il fait basculer son film vers la tragédie. Narrativement paresseux, plastiquement affreux, La table basse échoue entièrement. Et ce, en dépit d’une situation de départ amusante et embarrassante (la table basse et la gamine) et d’une scène inaugurale prometteuse.

dimanche 25 mai 2025

Tim Mielants, Tu ne mentiras point, 2025

Irlande, 1985. Un charbonnier découvre une jeune fille maltraitée dans un couvent. Le film est rugueux, austère, lent. Il alterne le drame rétrospectif de cet homme (pauvreté, perte de sa mère très jeune) et la découverte de cette maltraitance institutionnalisée. Porté par un Cillian Murphy impassible et contenu, le film n’est pas passionnant, mais il propose un traitement du son très intéressant et une fin abrupte qui en parachève assez bien l’éviction de tout romanesque.


samedi 24 mai 2025

Lawrence Valin, Little Jafna, 2025

L’infiltré. Thriller dans le 10ᵉ arrondissement avec une communauté jamais montrée au cinéma : les Tamouls. Ce film de genre propose une réflexion sur le communautarisme et l’allégeance aux codes. Il y a un sens du mouvement, de beaux plans et une belle photographie. Un polar sur un Paris exotique, très réussi.

vendredi 23 mai 2025

Mourad Winter, L’amour c’est surcôté, 2025

Début d’une histoire d’amour entre deux personnages issus de milieux sociaux différents. La photographie est assez belle, le duo d’acteurs est bien choisi et quelques répliques sont assez drôles. Mais l’indigence narrative de ce récit, composé de vignettes non articulées, est affligeante.


jeudi 22 mai 2025

Amélie Bonnin, Partir un jour, 2025

Il faut sans doute un certain goût pour la chanson — pour les émotions artificielles qu’elle fabrique, le terroir, et une nostalgie de l’adolescence à la campagne — pour apprécier Partir un jour. On y trouve : transfuge de classe, maternité non désirée, retour d’un amour adolescent, routier et bord de route. Il y a un soin dans les arrangements des réinterprétations, et on peut trouver à Juliette Armanet un charme dans quelques chansons. Une reprise lancée puis avortée de Cabrel constitue la seule idée cinématographique du film. Mais Partir un jour n’en reste pas moins une sorte d’épisode musical de Plus belle la vie, consternant dans sa forme télévisuelle et la pauvreté de son récit. Que ce téléfilm à l’ambition au ras du sol ait pu faire l’ouverture du Festival de Cannes en dit long sur l’état des prétentions filmiques françaises en 2025.


mercredi 21 mai 2025

Christopher McQuarrie, Mission : Impossible – The Final Reckoning, 2025

Tintin et le mystère de l’IA. En dépit d’un prologue récapitulatif, citationnel et discursif parfaitement superflu (l’histoire est simple : Ethan doit récupérer la clé dans un sous-marin et désamorcer l’entité), MI 8 est un grand film d’aventures structuré par deux scènes (le sous-marin et l’avion) de toute beauté, tension, spectaculaires, et à couper le souffle.

mardi 20 mai 2025

Masahiro Shinoda, Fleur pâle, 1964

Un yakuza, qui vient de sortir de prison, s'éprend d'une femme dont on ne saura rien, qu'il fait pénétrer dans un cercle de jeu. La photographie, les plans, le noir et blanc (la ville, les tripots, la nuit), la musique sont de toute beauté.  La violence y est extrêmement stylisée, très artificielle, affectée à l'image du film. Le récit est ténu, presque anecdotique. Un beau film de yakuza de la Nouvelle Vague japonaise.

lundi 19 mai 2025

Aitor Arregi, Jon Garaño, Marco, l’énigme d’une vie, 2025

Le président d’une association de victimes espagnoles de l’holocauste, qui s’est inventé cette biographie fictive, est démasquée. Un excellent biopic sur le mensonge comme vie, à la manière de L’adversaire de Carrère ou de la série Une amie dévouée avec Laure Calamy. Eduard Fernández, qui interprète le rôle de Marco est excellent.

Kiyoshi Kurosawa, Cloud, 2025

Un revendeur est démasqué par ceux qu’il a arnaqués. Le film commence comme une chronique de l’e-économie, vire en  Délivrance , en un film ...